Depuis que les oranges poussent sur les cerisiers, les anomalies de la nature, mises en évidence et en vedette, sont déclarées avenir des civilisations nouvelles. C’est une transgenre excitée qui a reçu le prix d’interprétation féminine au cours d’une fin d’après-midi cannoise où la langue française a été broyée par les invasions des patois étrangers venus de tous les horizons, ce qui était sans importance puisqu’un seul mot a été prononcé dix ou cent mille fois, le mot « merci », mot que j’avais oublié puisque la dernière fois que je l’ai entendu, c’était de la bouche d’une vieille dame quand je lui ai tenu ouverte la porte d’un train, en 1971, il me semble. Je ne l’emploie jamais. Mon entourage non plus. Ce n’est ni la politesse, ni la courtoisie qui m’étouffe et c’est tant mieux, parce que mourir étouffé est très angoissant, m’ont dit quelques amis expérimentés. Pour en revenir au club des marginaux qui nagent dans l’opulence des sentiments d’opérettes et des bouffonneries gargantuesques, je me demande où ils vivent, ce qu’ils y font et comment ils pataugent dans la vie des autres dont ils ignorent les ingrédients. Les autocongratulations, les touche-à-touche, les envolées sans ailes, les maîtresses d’école arrogantes, les leçons données à la terre entière, ne peuvent que cacher l’agonie de leur cinéma débordant l’écran pour se poser à côté de leurs augustes derrières, calés dans leurs fauteuils, face à eux-mêmes. Le miroir, pourtant intransigeant, leur échappe totalement.