https://klassikmusikopera.blogspot.com/2021/05/le-puits-au-fond-du-jardin-les.html
https://klassikmusikopera.blogspot.com/2022/01/le-puits-au-fond-du-jardin-faire-le.html
L’apprentissage d’un instrument, qu’il soit à cordes frottées ou pincées, à vent ou à clavier, c’est d’abord apprendre à maîtriser ses difficultés techniques pour acquérir une totale autonomie afin d’aborder en toute indépendance les œuvres de toutes les époques, de la renaissance au contemporain, et de partager ce plaisir souvent inconnu avec ceux qui en ont la capacité, en formation réduite ou en grand orchestre divers ou symphonique.
Les méthodes individuelles ancestrales toujours en vigueur aujourd’hui n’ont jamais donné les résultats escomptés, saufs pour les enfants doués, passionnés, travailleurs, courageux, musiciens innés et considérés par leur professeur. Pour les autres, très souvent majoritaires, ils n’auront acquit que de l’à peu près ou presque, qui les conduira très souvent à l’abandon ou à avoir l’impression de savoir jouer (ce que personne n’osera démentir) au sein de formations amateurs qui se contentent de peu. Ils auront passé ainsi à côté du plaisir de bien jouer et d’acquérir une culture musicale ouverte sur les grandes œuvres du patrimoine et sur le répertoire musical de qualité.
Et pourtant, il existe un moyen attrayant, passionnant, rapide et souvent spectaculaire : la pédagogie de groupe qui est une pédagogie à part entière et qui doit être mûrie et réfléchie avant sa mise en œuvre. Ce n’est pas une pédagogie de facilité. Elle ne consiste pas à entasser quelques élèves dans une salle de cours pour les obliger à écouter une leçon particulière lassante et décourageante, mais à réunir 3 élèves (ni 2, ni 4) et leur donner tour à tour, la possibilité de prendre les commandes du cours en parfaite harmonie avec leur professeur et partager, participer durant une heure et demie, à l’élaboration d’une progression active et pensée. Ici, le professeur ne sera que le maître du jeu, guidant et dirigeant dans la direction choisie, la plus opportune pour le groupe, mettant en valeur les techniques et les idées de musicalité dans un échange culturel fort et de première nécessité et ceci en essayant d’acquérir dans les délais les plus courts, le maximum de connaissances pour s’exprimer en toute liberté. En effet, l’idée reçue, selon laquelle, il faudrait dix ans, ou plus, pour maîtriser son instrument est totalement stupide. Avec une bonne méthode appropriée, trois ou quatre années devraient suffire pour jouer correctement une partition de moyenne difficulté. Nous sommes loin du compte…
Pour mettre en application cette méthode, il y a deux possibilités : réunir 3 élèves de même niveau, ou réunir 3 élèves de niveaux totalement différents, en faisant cohabiter un débutant, un intermédiaire (fin 1er cycle)) et un grand (3ème cycle). Ne voulant pas affoler et pousser au suicide les sceptiques (les professeurs sont souvent fragiles), je vais commencer par la première possibilité.
Avec 3 élèves de même niveau, le professeur se doit d’imposer un programme commun méthodique : progression précise sur la méthode papier (les bonnes vieilles méthodes sont excellentes et pas du tout démodées), progression construite avec intelligence à travers les œuvres du répertoire spécifique à l’instrument et progression écrite par le professeur lui-même en fonction du niveau des élèves et du groupe. Les effets bénéfiques et spectaculaires seront l’écoute et l’imitation pour la justesse, la recherche de la qualité du son, l’attaque de la note, et la musicalité. Travailler les gammes, les intervalles, les arpèges dans tous les tons en jouant les notes en alternance, en se les échangeant, d’abord à 1 voix, puis 2, puis 3, est un exercice profitable à plus d’un titre et surtout, jamais fastidieux. Aborder les morceaux du répertoire, en extrayant les difficultés, en donner les explications nécessaires en les accompagnant d’un échange verbal permanent sur le justificatif et le pourquoi de l’interprétation, est un enrichissement spectaculaire de l’élève qui transgressera sa technique en une interprétation musicale de qualité, ceci très souvent à son insu.
Un cours d’une heure et demie hebdomadaire dans ces conditions ne peut être que passionnant et attractif, mais évidemment fatiguant pour les protagonistes, d’autant plus que le professeur n’aura plus le loisir (c’est-à-dire le temps) de répondre à son portable, d’arpenter les couloirs pour discourir et de sortir respirer l’air du dehors pour fumer sa dernière cigarette. C’est pourquoi, il devra s’astreindre à ne pas dépasser deux cours par jour, s’il veut tenir jusqu’à la fin de l’année, et obtenir les résultats escomptés.
Pour la seconde manière, plus ambiguë, plus complexe, le professeur devra y apporter une attention toute particulière. Avec son trio, de niveaux différents, dont chaque élève ne pratique pas encore le même langage, il devra faire preuve d’une imagination fertile et jouer le jeu des échanges permanents entre ces niveaux supposés incompatibles. Et pourtant… Le plus grand conseillera le petit qui écoutera et « imitera » ses deux aînés, l’intermédiaire donnera son point de vue sur ses deux camarades, montrera ses capacités par rapport à leur travail, et le plus petit, bénéficiant des conseils des plus grands, s’épanouira davantage. Le professeur guidera tout ce monde sur le chemin qu’il aura choisi auparavant, et échangera véritablement sur tous les problèmes liés à l’instrument, puisque trois possibilités de niveau lui sont offertes en permanence. Il devra bien sûr tout contrôler pour éviter les dérives qui ne manqueront pas de se produire. Cet énorme travail portera ses fruits grâce à l’échange permanent qui sera la base de son enseignement.
Rien de tout cela n’est utopique. Cela a déjà été expérimenté et mérite qu’on y réfléchisse, ces indications n’étant qu’un plan de base pouvant être modifié au gré du professeur. L’essentiel est de comprendre que le cours individuel n’est qu’une facilité qui apporte peu à l’élève, le fait peu progresser et qui entraîne le professeur dans des habitudes de confort imaginaire, qui, au bout de quatre ou cinq années, le met dans une situation d’ennui profond, parce que, installé dans un travail de répétition permanent, dont il ne peut que se lasser. Attention à la dépression !...
Hervé Gallien, 21 septembre 2008
Mon « puits » de ce matin était consacré au contenu du groupe « Conditions de travail des enseignants artistiques » où l’on s’aperçoit que les dit-enseignants prennent des fonctions pour lesquelles ils ne connaissent ni le fonctionnement ni le règlement, ce qui m’autorise à supposer qu’ils ne doivent pas connaître grand-chose à l’enseignement. Oser demander à être rémunéré lorsque l’on est convoqué par le directeur hors horaire de travail et UNE FOIS PAR AN, c’est se foutre du monde, se foutre de la musique, se foutre de la pédagogie et se foutre de l’école qui même si on est mal payé - on a souvent le salaire qu’on mérite - permet de survivre bon gré mal gré. Mais que sont donc devenues les écoles de musiques, avec tous ces gens qui viennent enseigner une matière dont ils ne connaissent même pas le contenu. J’ai été directeur de conservatoire 35 ans et je n’aurais JAMAIS toléré le 100e de ce que je lis sur ce site de gens déboussolés. Apprendre la musique, c'est l’écouter, la décortiquer et la reproduire ensemble, en communauté avec le souci du travail harassant, mais passionnant sans lequel rien ne peut se passer. Peut-être aurez-vous la curiosité de lire ces deux articles qui résument mes réflexions sur ma vie de musiciens,
https://klassikmusikopera.blogspot.com/2021/06/le-puits-au-fond-du-jardin-impertinence.html
https://klassikmusikopera.blogspot.com/2021/05/le-puits-au-fond-du-jardin-les.html
et le travail qui a été le mien pour faire en sorte que ma maison devienne un lieu de culture et d’ouverture d’esprit. Il est évident que je me suis empressé de me retirer des « Conditions de travail des enseignants artistiques » car je n'ai jamais réussi à faire la relation entre ce groupe et la musique. Les écoles de musique sont en voie de disparition. Ça ne peut étonner personne. On se contente de parquer des enfants pendant que leurs parents vaquent dans les supermarchés.
Un professeur de conservatoire de musique :
Aujourd’hui je donne cours à un troisième cycle dans un petit conservatoire...
Valse en do dièse mineur de Chopin...
« C’est ce morceau mon devoir de l’été ». (Sans commentaire)
15 ans environ. Ne comprenait pas un seul des accords qu’il jouait, donc fautes toutes les mesures...
« Tu peux me dire en quelle tonalité tu es ?
- ah... euh... ah oui, sol majeur »
Non mais depuis le nombre d’années où il est en solfège, c’est à croire que personne ne lui a parlé de la tonalité...
Et si c’était un cas isolé...
Ma réponse :
Preuve irréfutable que l'enseignement dans les conservatoires ne fonctionne pas. Le conservatoire est un lieu où l'enfant doit rencontrer la musique, apprendre à l'aimer en l'écoutant, à la comprendre en l'analysant et en s'en servant comme moyen d'expression en la jouant. Apprendre à jouer de la trompette ou du piano ne signifie rien et se sert à rien si l'enfant est étranger à la musique. Le solfège non appliqué ne sert à rien. Il me semble que pour les 2 ou 3 premières années, l'élève ne doit avoir qu'un seul professeur (celui d'instrument) qui lui apprend la musique. Après, on peut spécialiser. Et parallèlement, il me semble que l'enfant doit se nourrir comme il nourrit son corps trois fois par jour. Il doit écouter de la musique, aller au concert, aller à l'opéra. A défaut d'interprètes en chair et en os, aujourd’hui, YouTube est une mine d'or. Cette valse de Chopin, il doit l'avoir entendue, écoutée mille fois par les plus grands interprètes, par son professeur (à chaque cours) et critiquer à sa manière pour faire ses choix. Se nourrir et apprendre avec la matière emmagasinée. Et puis, tant que tout le monde continuera la leçon particulière - honteux - rien ne pourra changer. Il faut organiser la pédagogie de groupe - 3 élèves ensembles - avec discussions, comparaisons, auditions et apprentissages communs. Entraide entre les 3 élèves avec le professeur-guide qui conseil. Au lieu de 9 ou 10 ans pour jouer mal d'un instrument, il est possible de faire mieux en 3 ans et de former des musiciens instrumentistes.
La règle fondamentale est que le professeur doit sans cesse se dire "Ça ne va pas. Pourquoi ?" Et la réponse n'est jamais 'parce que l'élève ne travaille pas". Votre élève ne connait pas les tonalités - cela n'a un intérêt que s'il les ressent - et bien parlez-lui en à chaque cours, avec écoute évidemment. J'ai mis mes idées en pratique dans mon conservatoire. J'ai été suivi. Peu. Mais je l'ai été. Et ça a marché !
Enseigner sans nourrir abondamment est une perte de temps.
Pour évoquer la vaccination, la télé et les médias ne trouvent rien de mieux que de poster la photo d’une épaule nue et d’une seringue munie d’une aiguille faisant trois fois son support en longueur et des gens niais et souriants comme si on leur injectait un produit hilarant. C’est laid et insultant. Le manque d’imagination des concepteurs de publicités mensongères - toutes les publicités sont mensongères - est confondant. Et ce sont ces gens qui gouvernent le monde parce que c’est par ces gens que le monde se laisse gouverner. La vaccination, c’est comme le virus, c’est comme le climat, c’est comme la playlist de France Inter, c’est comme le congé parental - super hilarant -, c’est comme le comportement de l’homme. Ce n’est que la chute vertigineuse de la pensée et du discernement dans le trou noir de mon puits au fond de mon jardin. Ça s’accumule ! Ça s’accumule ! Ça s’accumule ! Quand ça va être bourré, ça va éclater ! Et je ne vous raconte pas la suite…
Les écoles de musique sont dans une impasse. Elles coûtent une fortune aux municipalités et ne rapporte aucune voix aux élections. Avant on y apprenait la musique. Aujourd’hui, on se contente de faire ânonner la playlist de France Inter. Exit la gamme de mi bémol majeur en lié puis détacher, en binaire puis ternaire, en rythme simple puis brisé. Exit l’arpège de sol# mineur en lié puis détacher, en binaire puis ternaire, en rythme simple puis brisé. Exit le Prélude et Fugue en la bémol majeur de Jean Sébastien Bach, la Sonate no 4 en la mineur, D.537 de Franz Schubert, la Sonatine pour flûte et piano de Pierre Boulez. Exit les innombrables œuvres qui ont fait la richesse de la musique et qui ont donné à l’homme ses lettres de noblesse. Dans quelle école de musique évoque-t-on les cinq révolutions de notre monde : Orfeo de Claudio Monteverdi, Don Giovanni de Wolfgand Amadeus Mozart, Pelléas et Mélisande de Claude Debussy, Tristan et Isolde de Richard Wagner et Wozzek d’Alban Berg. Ici, se cachent les richesses universelles de notre monde. Ici, se trouve la solution à nos problèmes. Ici, l’homme devient homme et quitte définitivement son habit de zombie. Et, puis, qui peut me dire où, dans quelle école, avec quel maître, le professeur - censé enseigner - a appris ? Et quelles sont ses notions envers la pédagogie, envers la psychologie, envers la psychanalyse, envers la relation enfant-adulte, notions qui devraient primer obligatoirement sur ses connaissances des techniques musicales indispensables ? Je m’étais juré de na plus jamais abordé ce sujet qui entraîne des polémiques interminables. Mais, d’après ce que je glane ici ou là, ma révolte intérieure devient insupportable. Alors, j’ai redit. Sans doute pour la dernière fois.
L’apprentissage d’un instrument, qu’il soit à cordes frottées ou pincées, à vent ou à clavier, c’est d’abord apprendre à maîtriser ses difficultés techniques pour acquérir une totale autonomie afin d’aborder en toute indépendance les œuvres de toutes les époques, de la renaissance au contemporain, et de partager ce plaisir souvent inconnu avec ceux qui en ont la capacité, en formation réduite ou en grand orchestre divers ou symphonique.
Les méthodes individuelles ancestrales toujours en vigueur aujourd’hui n’ont jamais donné les résultats escomptés, saufs pour les enfants doués, passionnés, travailleurs, courageux, musiciens innés et considérés par leur professeur. Pour les autres, très souvent majoritaires, ils n’auront acquit que de l’à peu près ou presque, qui les conduira très souvent à l’abandon ou a avoir l’impression de savoir jouer (ce que personne n’osera démentir) au sein de formations amateurs qui se contentent de peu. Ils auront passé ainsi à côté du plaisir de bien jouer et d’acquérir une culture musicale ouverte sur les grandes œuvres du patrimoine et sur le répertoire musical de qualité.
Et pourtant, il existe un moyen attrayant, passionnant, rapide et souvent spectaculaire : la pédagogie de groupe qui est une pédagogie à part entière et qui doit être mûrie et réfléchie avant sa mise en œuvre. Ce n’est pas une pédagogie de facilité. Elle ne consiste pas à entasser quelques élèves dans une salle de cours pour les obliger à écouter une leçon particulière lassante et décourageante, mais à réunir 3 élèves (ni 2, ni 4) et leur donner tour à tour, la possibilité de prendre les commandes du cours en parfaite harmonie avec leur professeur et partager, participer durant une heure et demie, à l’élaboration d’une progression active et pensée. Ici, le professeur ne sera que le maître du jeu, guidant et dirigeant dans la direction choisie, la plus opportune pour le groupe, mettant en valeur les techniques et les idées de musicalité dans un échange culturel fort et de première nécessité et ceci en essayant d’acquérir dans les délais les plus courts, le maximum de connaissances pour s’exprimer en toute liberté. En effet, l’idée reçue, selon laquelle, il faudrait dix ans, ou plus, pour maîtriser son instrument est totalement stupide. Avec une bonne méthode appropriée, trois ou quatre années devraient suffire pour jouer correctement une partition de moyenne difficulté. Nous sommes loin du compte…
Pour mettre en application cette méthode, il y a deux possibilités : réunir 3 élèves de même niveau, ou réunir 3 élèves de niveaux totalement différents, en faisant cohabiter un débutant, un intermédiaire (fin 1er cycle)) et un grand (3ème cycle). Ne voulant pas affoler et pousser au suicide les sceptiques (les professeurs sont souvent fragiles), je vais commencer par la première possibilité.
Avec 3 élèves de même niveau, le professeur se doit d’imposer un programme commun méthodique : progression précise sur la méthode papier (les bonnes vieilles méthodes son excellentes et pas du tout démodées), progression construite avec intelligence à travers les œuvres du répertoire spécifique à l’instrument et progression écrite par le professeur lui-même en fonction du niveau des élèves et du groupe. Les effets bénéfiques et spectaculaires seront l’écoute et l’imitation pour la justesse, la recherche de la qualité du son, l’attaque de la note, et la musicalité. Travailler les gammes, les intervalles, les arpèges dans tous les tons en jouant les notes en alternance, en se les échangeant, d’abord à 1 voix, puis 2, puis 3, est un exercice profitable à plus d’un titre et surtout, jamais fastidieux. Aborder les morceaux du répertoire, en extrayant les difficultés, en donner les explications nécessaires en les accompagnant d’un échange verbal permanent sur le justificatif et le pourquoi de l’interprétation, est un enrichissement spectaculaire de l’élève qui transgressera sa technique en une interprétation musicale de qualité, ceci très souvent à son insu.
Un cours d’une heure et demie hebdomadaire dans ces conditions ne peut-être que passionnant et attractif, mais évidemment fatiguant pour les protagonistes, d’autant plus que le professeur n’aura plus le loisir (c’est-à-dire le temps) de répondre à son portable, d’arpenter les couloirs pour discourir et de sortir respirer l’air du dehors pour fumer sa dernière cigarette. C’est pourquoi, il devra s’astreindre à ne pas dépasser deux cours par jour, s’il veut tenir jusqu’à la fin de l’année, et obtenir les résultats escomptés.
Pour la seconde manière, plus ambiguë, plus complexe, le professeur devra y apporter une attention toute particulière. Avec son trio, de niveaux différents, dont chaque élève ne pratique pas encore le même langage, il devra faire preuve d’une imagination fertile et jouer le jeu des échanges permanents entre ces niveaux supposés incompatibles. Et pourtant… Le plus grand conseillera le petit qui écoutera et « imitera » ses deux aînés, l’intermédiaire donnera son point de vue sur ses deux camarades, montrera ses capacités par rapport à leur travail, et le plus petit, bénéficiant des conseils des plus grands, s’épanouira davantage. Le professeur guidera tout ce monde sur le chemin qu’il aura choisi auparavant, et échangera véritablement sur tous les problèmes liés à l’instrument, puisque trois possibilités de niveau lui sont offertes en permanence. Il devra bien sûr tout contrôler pour éviter les dérives qui ne manqueront pas de se produire. Cet énorme travail portera ses fruits grâce à l’échange permanent qui sera la base de son enseignement.
Rien de tout cela n’est utopique. Cela a déjà été expérimenté et mérite qu’on y réfléchisse, ces indications n’étant qu’un plan de base pouvant être modifié au gré du professeur. L’essentiel est de comprendre que le cours individuel n’est qu’une facilité qui apporte peu à l’élève, le fait peu progresser et qui entraîne le professeur dans des habitudes de confort imaginaire, qui, au bout de quatre ou cinq années, le met dans une situation d’ennui profond, parce que, installé dans un travail de répétition permanent, dont il ne peut que se lasser. Attention à la dépression !...
Hervé Gallien, 21 septembre 2008
Alagna - Robertino pour les intimes - a encore montré sa terrible et continuelle incompétence chez Lemoine, en direct sur France 5. Il s‘est arrêté à la deuxième phrase de sa chansonnette. « Je ne peux pas le faire ! » a-t-il dit pour justifier sa défaite. Quand on prétend être le meilleur ténor du monde - ce ne sont surtout que les journalistes spécialisés et les fans fanatiques et cramoisis qui le prétendent - et qu’on se permet d’aborder le rôle de Lohengrin sans en avoir la vaillance et la voix - il va sans doute s’emparer de Siegfried puis de Tristan au mépris du génie de Wagner - et qu’on n’est pas capable d’aligner deux notes de suite d’une comptine, on prend sa retraite, ce qu’aurait dû faire le ténorino bien avant d’aborder sa carrière. Je me demande toujours pourquoi se trouvent souvent dans la lumière ceux qui ne devraient jamais sortir de l’obscurité.
La rentrée journalière en prison est désormais fixée à 18h. C’est un peu tôt pour retrouver les rats qui rongent les doigts de pieds. Et parmi les grands oubliés, toujours et encore les écoles de musique qui depuis des mois ne peuvent plus travailler. Je me sens concerné puisque j’ai été durant 35 ans à la tête de l’une d’entre-elles. Ma réflexion et mon expérience me disent que les choses ne font que s’accélérer et que de toutes les manières, un jour ou l’autre, elles fermeront définitivement. Dépendre d’un maire n’est pas vivable. Une école de musique coûte une fortune à une municipalité… et pas un électeur. Dans ces écoles on continue la pratique du cours individuel ce qui n’est pas logique dans un établissement municipal. À ma connaissance et encore aujourd’hui, aucun directeur - convaincu comme je l’ai été et comme je le suis encore - n’a opté pour la pédagogie de groupe - 3 élèves actifs et participatifs ensembles - chère à Claude-Henri Joubert avec lequel j’ai heureusement collaboré. La fermeture définitive des écoles de musique aura pour coupable les politiques avant tout mais aussi sans doute les enseignants qui ne sont pas formés et qui ignorent les indispensables de la pédagogie, de la psychologie et de la psychanalyse. Enseigner est un métier. Un métier s’apprend et je ne sais toujours pas où les professeurs ont appris leur métier. Et puis, les écoles de musique devraient quitter les municipalités pour intégrer l’Éducation nationale, ce qui changerait tout. Ce n’est qu’une proposition que j’ai formulée pendant des années et qui n’a jamais recueilli le moindre écho.
L’apprentissage d’un instrument, qu’il soit à cordes frottées ou pincées, à vent ou à clavier c’est d’abord apprendre à maîtriser ses difficultés techniques pour acquérir une totale autonomie afin d’aborder en toute indépendance les œuvres de toutes les époques, de la renaissance au contemporain, et de partager ce plaisir souvent inconnu avec ceux qui en ont la capacité, en formation réduite ou en grand orchestre divers ou symphonique.
Les méthodes individuelles ancestrales toujours en vigueur aujourd’hui n’ont jamais donné les résultats escomptés, saufs pour les enfants doués, passionnés, travailleurs, courageux, musiciens innés et considérés par leur professeur. Pour les autres, très souvent majoritaires, ils n’auront acquis que de l’à peu près ou presque, qui les conduira très souvent à l’abandon ou à avoir l’impression de savoir jouer (ce que personne n’osera démentir) au sein de formations amateurs qui se contentent de peu. Ils auront passé ainsi à côté du plaisir de bien jouer et d’acquérir une culture musicale ouverte sur les grandes œuvres du patrimoine et sur le répertoire musical de qualité.
Et pourtant, il existe un moyen attrayant, passionnant, rapide et souvent spectaculaire : la pédagogie de groupe qui est une pédagogie à part entière et qui doit être mûri et réfléchi avant sa mise en œuvre. Ce n’est pas une pédagogie de facilité. Elle ne consiste pas à entasser quelques élèves dans une salle de cours pour les obliger à écouter une leçon particulière lassante et décourageante, mais à réunir 3 élèves (ni 2, ni 4) et leur donner tour à tour, la possibilité de prendre les commandes du cours en parfaite harmonie avec leur professeur et partager, participer durant une heure et demie, à l’élaboration d’une progression active et pensée. Ici, le professeur ne sera que le maître du jeu, guidant et dirigeant dans la direction choisie, la plus opportune pour le groupe, mettant en valeur les techniques et les idées de musicalité dans un échange culturel fort et de première nécessité et ceci en essayant d’acquérir dans les délais les plus courts, le maximum de connaissances pour s’exprimer en toute liberté. En effet, l’idée reçue, selon laquelle, il faudrait dix ans, ou plus, pour maîtriser son instrument est totalement stupide. Avec une bonne méthode appropriée, trois ou quatre années devraient suffire pour jouer correctement une partition de moyenne difficulté. Nous sommes loin du compte…
Pour mettre en application cette méthode, il y a deux possibilités : réunir 3 élèves de même niveau, ou réunir 3 élèves de niveaux totalement différents, en faisant cohabiter un débutant, un intermédiaire (fin 1er cycle)) et un grand (3ème cycle). Ne voulant pas affoler et pousser au suicide les sceptiques (les professeurs sont souvent fragiles), je vais commencer par la première possibilité.
Avec 3 élèves de même niveau, le professeur se doit d’imposer un programme commun méthodique : progression précise sur la méthode papier (les bonnes vieilles méthodes sont excellentes et pas du tout démodées), progression construite avec intelligence à travers les œuvres du répertoire spécifique à l’instrument et progression écrite par le professeur lui-même en fonction du niveau des élèves et du groupe. Les effets bénéfiques et spectaculaires seront l’écoute et l’imitation pour la justesse, la recherche de la qualité du son, l’attaque de la note, et la musicalité. Travailler les gammes, les intervalles, les arpèges dans tous les tons en jouant les notes en alternance, en se les échangeant, d’abord à 1 voix, puis 2, puis 3, est un exercice profitable à plus d’un titre et surtout, jamais fastidieux. Aborder les morceaux du répertoire, en extrayant les difficultés, en donner les explications nécessaires en les accompagnant d’un échange verbal permanent sur le justificatif et le pourquoi de l’interprétation, est un enrichissement spectaculaire de l’élève qui transgressera sa technique en une interprétation musicale de qualité, ceci très souvent à son insu.
Un cours d’une heure et demie hebdomadaire dans ces conditions ne peut-être que passionnant et attractif, mais évidemment fatiguant pour les protagonistes, d’autant plus que le professeur n’aura plus le loisir (c’est-à-dire le temps) de répondre à son portable, d’arpenter les couloirs pour discourir et de sortir respirer l’air du dehors pour fumer sa dernière cigarette. C’est pourquoi, il devra s’astreindre à ne pas dépasser deux cours par jour, s’il veut tenir jusqu’à la fin de l’année, et obtenir les résultats escomptés.
Pour la seconde manière, plus ambiguë, plus complexe, le professeur devra y apporter une attention toute particulière. Avec son trio, de niveaux différents, dont chaque élève ne pratique pas encore le même langage, il devra faire preuve d’une imagination fertile et jouer le jeu des échanges permanents entre ces niveaux supposés incompatibles. Et pourtant… Le plus grand conseillera le petit qui écoutera et « imitera » ses deux aînés, l’intermédiaire donnera son point de vue sur ses deux camarades, montrera ses capacités par rapport à leur travail, et le plus petit, bénéficiant des conseils des plus grands, s’épanouira davantage. Le professeur guidera tout ce monde sur le chemin qu’il aura choisi auparavant, et échangera véritablement sur tous les problèmes liés à l’instrument, puisque trois possibilités de niveau lui sont offertes en permanence. Il devra bien sûr tout contrôler pour éviter les dérives qui ne manqueront pas de se produire. Cet énorme travail portera ses fruits grâce à l’échange permanent qui sera la base de son enseignement.
Rien de tout cela n’est utopique. Cela a déjà été expérimenté et mérite qu’on y réfléchisse, ces indications n’étant qu’un plan de base pouvant être modifié au gré du professeur. L’essentiel est de comprendre que le cours individuel n’est qu’une facilité qui apporte peu à l’élève, le fait peu progresser et qui entraîne le professeur dans des habitudes de confort imaginaire, qui, au bout de quatre ou cinq années, le met dans une situation d’ennui profond, parce que, installé dans un travail de répétition permanent, dont il ne peut que se lasser. Attention à la dépression !...
Hervé Gallien, 21 septembre 2008
PS : ceci est le fruit de ma réflexion après 35 années passées à la direction de l’école de musique d’Aix-les-Bains en Savoie. Ecrit il y a 12 ans, je ne modifierai pas une seule ligne aujourd’hui. Il me semble que rien n’a changé, sinon en pire et je ne crois pas me tromper. Il faut redéfinir la musique et les moyens de l’enseigner. Mais pour cela il faut accepter de toujours tout remettre en question ce qui est très difficile dans une société de paraître immédiat, totalement incompatible avec l’art de la musique.
L’école de musique est le lieu commun de cinq partenaires indissociables : le parent d’élève et son exigence, l’élève et sa motivation, le professeur et sa compétence, le directeur et son imagination, le politique et sa peur schizophrénique. Il faut donc concilier l’inconciliable en associant la musique exploitée dans ses multiples éléments, la pédagogie privilégiée dans son lien social et culturel et la politique des élus frileux et hantés par la perte de leur pouvoir. Les écoles qui ont assimilé ces différentes composantes se font rares et sont en voie de disparition. Elles sont invisibles. Les autres, infiniment majoritaires, sont multiples et fleurissent à chaque coin de rue. Elles ne servent à rien, mais elles sont visibles. Si l’on considère que le but initial de l’établissement spécialisé est de faire découvrir la musique, en imprégner l’élève, lui apprendre à l’utiliser, à la malaxer, à la construire, à la maîtriser, à l’interpréter en la lisant couramment par l’application d’un enseignement intelligent, rigoureux, courageux, sans concession, demandant un effort constant et permanent de la part de chacun des partenaires associés et d’imposer une méthode de contenus, appliquée rigoureusement avec une méthode de travail élaborée, constante et progressive, on ne peut que constater l’échec cuisant actuel et en tirer les conclusions qui s’imposent, en remettant en vigueur l’enseignement du nom des notes et des trois éléments fondamentaux que sont leur durée, leur hauteur et leur intensité, afin d’acquérir dans les délais les plus brefs, l’autonomie nécessaire à la lecture et à l’interprétation de toutes partitions. L’ère de l’amusement et de la perte de temps a fait suffisamment de ravages. Enseignons ou laissons les enfants vaquer à d’autres occupations.
Le parent d’élève, c’est la maman qui se présente au secrétariat pour exiger l’inscription de son enfant dans la classe instrumentale qu’elle a choisie en fonctions de critères bien définis et dont elle a le secret : le piano, pour justifier la présence inutile du vieux meuble qui orne son salon et parce qu’avec un seul doigt on peut en sortir un son, ou la flûte à bec pipeau en plastique, en raison de son coût modique. Surtout pas le violon, parce que ça grince et ça joue faux, ça fait mal aux oreilles et ça dérange papa lorsqu’il rentre de son travail, très fatigué. Et puis surtout, et c’est primordial, maman ne veut pas entendre parler de professionnalisme alors qu’elle en rêve secrètement. Son enfant ne vient ici que pour son plaisir personnel - il aime tellement la musique ! - « jouer » sans se fatiguer et sans traumatisme, et elle y veillera. Elle feint d’ignorer la contrainte du travail journalier que demande un instrument pour progresser, et l’administration se garde bien de l’en informer. L’élu surveille, il faut remplir la maison.
L’élève est soumis ou indépendant. Il suit sa maman ou décide lui-même et ce n’est pas plus mal. Le problème c’est que la plupart du temps, c’est de la guitare qu’il veut jouer, électrique… ose-t-il parfois avouer. C’est bien normal puisque c’est le seul instrument (re)présenté à la télé. Il le voit sur l’écran, c’est facile à jouer, ça fait beaucoup de bruit et c’est très applaudi avec une horde de cris. S’il est déterminé, lui expliquer qu’il s’agit d’un instrument primitif pour imbéciles incompétents, ça ne sert à rien. Il faut le laisser faire. Il jouera pendant des années un ou deux accords de plus en plus forts, de plus en plus laids et se satisfera de cet état d’infirmité. Mais s’il n’a pas de préjugé, on peut tout lui demander et il peut tout faire si on sait l’écouter. Mais comme il est changeant, impulsif et très sollicité, c’est la concentration qui va le pénaliser. Aussi, seule la conviction d’un professeur admiré peut l’aider dans sa démarche en l’accompagnant et en créant le lien social et affectif qu’il attend. Sa difficulté essentielle sera le langage musical. Il devra apprendre la technique d’une langue qu’il n’entend jamais, parallèlement à une technique instrumentale contraire aux automatismes de son propre corps. Quel que soit l’instrument, il devra acquérir une dextérité et une souplesse dont aucun des gestes n’est naturel, et c’est seulement l’effort constant et journalier qui lui permettra de faire face aux difficultés. C’est avec la complicité professeur-parent que sa réussite sera rapide et confirmée.
Le professeur est l’identité visible de l’école de musique. C’est lui qui enseigne, c’est à lui que l’on s’adresse. Il renseigne comme il enseigne, selon sa conviction ou sa capacité. Des convictions, il en a, il n’a même que ça, des bonnes, des moins bonnes et des mauvaises, mais quel que soit le cas de figure, il « sait » comment enseigner : si l’élève ne comprend pas, c’est qu’il ne travaille pas. Il a la fâcheuse habitude de trop souvent oublier que son principal souci doit être l’autonomie qu’il se doit de faire acquérir à l’élève, pour qu’il puisse au plus tôt, seul chez lui, mettre en pratique ce qu’il lui a appris. Si le professeur y met volonté et passion, c’est seulement au bout de quelques années qu’il aura compris ce qu’est l’enseignement, parce que ce qu’on lui a appris, ce n’est que de la théorie de bureaucratie. Curieusement, dans son école, les cours sont donnés sous la forme de leçons particulières. L’élève est seul, le professeur ne s’occupe que de lui, sans imaginer un seul instant que les bons conseils qu’il lui donne, pourrait profiter à d’autres. Mais cela l’arrange, même si, au bout d’un certain temps, ça engendre l’ennui. Et puis, entre les absences, les maladies et les épidémies, ça lui laisse du temps, non pas pour travailler son instrument, mais pour hanter les couloirs afin de prendre la température du moment auprès de ses collègues et raconter la dernière du directeur. Mais si discourir l’ennuie, il préfère user de son portable (avant il allait au secrétariat), pour combler les trous laissés par les absents, afin de rentrer au plus tôt chez lui, ceci au mépris de l’administration qui le paie pour un nombre d’heures hebdomadaires précises et non pas pour l’enseignement. Certains directeurs, des fous furieux probablement, lui ont proposé de s’adapter à la pédagogie de groupe, qui est une des rares méthodes qui mérite l’exploration. Mais, bourré de préjugés, il ne croit pas à son efficacité. Alors à quoi bon ? il laisse tomber. Et, s’il en a compris les avantages, très vite il s’aperçoit qu’il faut beaucoup de courage et de ténacité pour ne pas se fatiguer : trois élèves travaillant ensemble pendant une heure et demie sans pouvoir souffler un instant, c’est très épuisant. Alors, exit l’efficacité, il faut mieux abandonner et revenir à son petit plan-plan. L’enseignement ne peut passer que par la méthode progressive, papier et pédagogique. Encore faut-il y réfléchir, la trouver et l’appliquer. Et ce n’est pas simple pour le professeur qui n’y est pas entraîné, qui ne veut pas se faire aider et qui fait l’objet d’une critique régulière qu’il a souvent cherchée. C’est donc l’absence de méthode qui va le perdre et décourager l’élève qui ne peut s’y retrouver. Enfin, le professeur doit observer l’élève et lui faire remarquer tout ce qui peut nuire à sa progression. Ici, la lâcheté est souvent de mise, car l’élève est susceptible – un peu moins que le professeur – et risquerait de le lâcher. Je connais certains professeurs, de piano notamment, qui ne s’inquiète nullement du cas d’élèves avancés, musiciens, intéressants, qui jouent avec beaucoup d’intérêt et de musicalité, Beethoven, Schubert, Debussy ou Ravel, sans savoir lire la moindre note. Ils ne connaissent que les doigtés. C’est difficile à croire et pourtant, ils sont très nombreux. Par contre ils « improvisent » ! Il y a aussi des professeurs spécialistes des tris, par le découragement systématique des élèves n’ayant pas grâce à leurs yeux pour raisons diverses, manque de travail ou manque de sympathie, ne gardant ainsi dans les rangs, que l’élite savamment choisie. Il y a enfin le professeur de violon ou de violoncelle qui s’est mis dans la tête qu’il est tout à fait normal qu’un élève joue faux pendant des décennies, ce qui signifie qu’il ne jouera jamais juste. Expliquer au professeur que c’est dès le premier jour qu’il doit exiger la justesse, et l’obtenir, le scandalise et le rend fou. Au bout de quelques années, il en perd l’oreille et prend son directeur pour un maniaque déjanté. Et pendant ce temps, l’élève continue à égrainer ses fausses notes sans même savoir qu’il ne sait pas jouer.
Le directeur est l’âme invisible de l’école. Il se rend visible de temps à autre et chacune de ses apparitions, même souhaitée, est redoutée. Sa force, c’est sa conviction, sa manière de transmettre ses idées et de les faire respecter, d’une part, par son patron, le maire, qui n’en a rien à faire et qui réagit seulement et négativement à la vue des budgets suggérés, et d’autre part, ses subordonnés, les professeurs qui le considèrent ou le méprisent en fonction de son caractère et des pédagogies qu’il veut imposer. Il ne sera respecté qu’en fonction de sa compétence, qui doit être totale et inébranlable. Il doit être incollable et avoir réponse à tout. La culture et la pédagogie doivent être son arme naturelle pour vaincre et s’attirer les sympathies. Les professeurs compétents alors le reconnaîtront et l’harmonie règnera dans la maison. Si le directeur rencontre l’incompétence, il doit la combattre vaillamment, sans arrières pensées et laisser le professeur devant ce double choix : la formation ou la porte. Mais il se doit de reconnaître le professeur de qualité et celui qui fait des efforts pour y accéder, les encourager et leur faire confiance. C’est avec eux qu’il doit partager ses idées et mettre en place les pédagogies nécessaires pour l’efficacité. Il ne doit pas tolérer les méthodes illusoires de la facilité, faites pour amuser. Les détours et les mensonges sont à bannir parce que la seule vérité est que l’apprentissage de la musique est difficile et ne s’acquière que par le travail, le courage et la volonté. Il faut interdire les stupidités : formation musicale, improvisation, musiques actuelles et diverses autres niaiseries qui prennent à l’élève le temps qu’il doit consacrer aux seules matières efficaces : le solfège – savoir déchiffrer un texte musical en chantant et en battant la mesure – et la technique de son instrument – gammes, arpèges, et autres exercices – pour en jouer naturellement. Au lieu de perdre son temps en réunion avec ses collègues des autres établissements, le directeur doit s’entourer de pédagogues confirmés, spécialistes ou généralistes, qui, ayant fait l’inventaire de la maison, soient capables d’entamer une collaboration guidant et conseillant sur ce qu’il y a de mieux à faire. Le directeur doit aussi administrer, ce qui veut dire organiser méticuleusement une maison ou souvent, l’anarchie règne en maître, et dans ce domaine, n’écouter que sa raison, quitte à déplaire. Tout ce travail ne peut se faire que si la ligne budgétaire est en adéquation. Tout se paie. L’école a un coût élevé en matériel et en salaires. Il faut donc obtenir l’adhésion du maire, ce qui n’est pas une mince affaire, pour le recrutement et l’achat du petit crayon au grand piano à queue de concert. Il doit donc convaincre l’élu et pour cela bien le connaître afin d’engager un combat à égalité. Il faut toujours se battre avec la même arme que l’adversaire. Ici, c’est le mensonge. Il doit donc mentir, surtout sans rougir et inventer les arguments susceptibles de toucher la corde sensible. C’est sa seule chance d’obtenir ce dont son établissement a besoin pour vivre ou le plus souvent pour survivre. Le directeur qui pense le contraire et qui est donc dans l’erreur, c’est celui qui courtise, courbe l’échine et se prostitue en léchant les bottes de l’élu. Il n’obtiendra dans ces conditions, que restes et mépris. Le directeur a tous les pouvoirs et n’en a aucun. Seule sa personnalité et ses hautes compétences professionnelles feront de son école un lieu privilégié où l’on apprend sans perdre son temps. Enfin, se pose une dernière question : le directeur, qui est-il ? Généralement, c’est un musicien aigri qui a échoué, un instrumentiste d’orchestre lassé ou viré, un compositeur non joué, un opportuniste incompétent et ambitieux, un chef d’orchestre frustré avide de pouvoir et ne sachant pas diriger. Mais ce peut-être aussi, cela arrive, rarement, un homme sincère, cultivé, connaissant toutes les matières nécessaires pour son métier, ayant le désir de faire avancer intelligemment des projets authentiques dans l’efficacité, pour que les nouvelles générations puissent se nourrir de musique, de la vraie musique, la musique classique oubliée et très souvent enterrée, et vivre pleinement leur passion en amateur ou professionnel éclairé. Le directeur digne de cette fonction, ce n’est que cela.
Le politique, dernier nommé mais primordial dans
le concert de ce quintette indissociable, c’est le maire de la ville où l’école
est implantée. Son art n’est pas celui de la musique mais celui de courtiser
ses électeurs pour mieux les conserver. Son action n’a d’importance que si elle
est visible aux yeux du monde entier. C’est lui qui détient l’argent, il en a
beaucoup, et c’est lui qui le répand, à son gré. C’est pourquoi il est le roi,
le maître absolu et entend le rester. Et c’est aussi pourquoi, à ses yeux, la
musique n’a que l’importance qu’une infime minorité veut bien lui donner. Il
s’est toujours demandé pourquoi l’état l’a affublé d’une telle calamité qui ne
lui attire qu’ennuis et contrariétés. Et s’il en a si peur, c’est que l’art n’est
accessible qu’aux esprits élevés. Son mot d’ordre est la démagogie : ouvrir,
rassembler pour faire croire d’exister. Mais pour nous c’est se trahir et tout
le contraire de ce qu’il faut faire : prendre sa liberté au risque de se faire
virer.
Hervé Gallien, 9 mai 2008
PS : ceci est le fruit de ma réflexion après 35 années passées à la direction de l’école de musique d’Aix-les-Bains en Savoie. Ecrit il y a 12 ans, je ne modifierai pas une seule ligne aujourd’hui. Il me semble que rien n’a changé, sinon en pire et je ne crois pas me tromper. Il faut redéfinir la musique et les moyens de l’enseigner. Mais pour cela il faut accepter de toujours tout remettre en question ce qui est très difficile dans une société de paraître immédiat, totalement incompatible avec l’art de la musique.