Un orchestre hors-fosse
confiné dans sa salle de répétition, des chœurs invisibles, des chanteurs sans
repères, une salle de cinquante personnes, une mise en scène avec des gens en
costumes de ville, et Zurich a eu l’audace avec cette recette indigeste de
vouloir nous faire avaler l’impossible. « Simon Boccanegra », un des
plus beaux, des plus subtils et des plus verdiens opéras de Verdi, en direct
sur Arte, hier après-midi. Il fallait oser. Si les rôles de Simon et d’Amélia -
et quelques autres tout de même - étaient tenus par des « grands »,
celui de Gabriele - le ténor - était à fuir : faux, aigus sur le fil. J’ai
failli écrire que seul Alagna était son égal mais je me ravise : Alagna
est encore plus mauvais. Mais le problème n’est pas là. Il est dans le fait qu’un
opéra à la télé n’est que la représentation de la représentation d’un opéra sur
petit écran avec pour véritable chef d’orchestre, le réalisateur qui est aux
manettes. Arte prétend avoir voulu toucher un public nouveau alors qu’il n’a
fait que le rebuter et le décourager à tout jamais de se rendre dans une salle
- une vraie - pour écouter et voir un opéra - un vrai -. L’opéra est un tout :
musique, chant, théâtre, danse, spectacle total prenant et émouvant de bout en
bout. Hier, j’ai entendu et je n’ai rien vu. Pour moi, c’est trop incomplet.
Zurich m’a fait une mauvaise farce et ce n’est pas parce que c’était gratuit
que je n’ai pas le droit de manifester mon mécontentement et ma désapprobation.